[I.1 - Q.3] La bataille des traîtres

A forcer le destin, la vie nous réserve des curieuses situations ! Dans la même minute, il s’imagina tué dans cette ruelle sombre par une bande de conspirateurs parce qu’il n’avait rien trouvé de mieux à faire que intervenir dans une situation qui encore une fois ne le regardait en rien … Ce qu’il advint, sa vision ne lui en avait clairement pas parlé.

Tout d’abord le regard interloqué de Skadi en le voyant aurait pu, dans d’autre situation, lui arracher un sourire … Mais c’est le cri du garde qui figea tout le monde : Skadi, ses compagnons conspirateurs et Mab. Le regard crispé de la sorceleuse passa immédiatement dans un registre plus proche de la panique. Elle aurait nié ceci avec vigueur et argué que c’était au grand maximum de la contrariété mais le débat ne pourrait pas avoir lieu … Elle disparu à la fin de cette minute fatidique. Elle disparu comme aspirer par l’obscurité ! Ou plus précisément par cette main qui l’agrippa sans vergogne et l’arracha à la contemplation de son druide préféré qui n’avait vraiment mais alors vraiment rien à faire ici.

Rester interdit n’était pas une option viable actuellement car pour ainsi dire… Il était tout à fait vrai que Mab n’avait vraiment mais alors vraiment rien à faire ici. En tout cas, cela serait sans nul doute la conclusion du garde qu’on entendait déjà arriver précipitamment. Il avait déjà expérimenté un trop grand nombre de fois l’impossible discussion avec un garde qui ne voulait pas de toi dans sa zone, ainsi il savait qu’il fallait impérativement quitter sa position en plein milieu de la rue.

Il existait indubitablement cette option de fuite vers la ruelle d’où il venait. Il avait arpenté ce chemin quelques fois et il savait qu’il pourrait perdre le garde si jamais ce dernier souhaitait le poursuivre. La logique aussi voulait que le garde suive le groupe plus important et plus bruyant, lui laissant les minutes nécessaires à sa totale disparition, lui laissant ainsi du temps pour trouver une meilleure place pour se protéger durant la nuit.
Il était tout à fait clair que l’option la plus logique, la plus sage et … définitivement la plus rationnelle serait de retourner en arrière et trouver plus tard un moyen d’en savoir plus...

… Mab se précipita à la suite de Skadi et de sa bande !

On ne se refait pas…

Le brouaha des conversations tout autour le déconcentra un peu alors qu’il écoutait l’homme en face et ce que lui murmurait Matylda. Elle avait raison ; les gens tout autour ne semblaient pas faire preuve d’une si grande anxiété tant bien même l’ombre de la bataille à venir planait sur eux. Tant qu’ils avaient leur porte de sortie … Chance et Matylda pouvaient être tranquilles, ne serait-ce que pour un temps. De plus, il n’oubliait pas Isumdra qu’ils avaient laissé au village précédant et qu’il devait venir récupérer, comme il l'avait prévu. Mais pas de coin tranquille où se reposer à Sodden ; c’était dans un piège mortel qu’ils s’étaient précipités. Il devait trouver une solution. Pour Matylda. Pour Isumdra.

« Admettons que vous ayez raison ; ça ne nous dit pas ce qu’on peut y faire, à cette situation. Hormis nous inquiéter pour notre avenir, je veux dire. » répondit-il à l’homme en face en se calant contre le dossier de sa chaise, un sourire amusé planant sur son visage. Sur ces mots il chercha les yeux de Matylda pour savoir ce qu’elle pensait de tout ça, puis après une seconde ou deux, il se tourna pour avoir également l’avis de l’insulaire … seulement pour remarquer qu’il n’était plus là. Allons bon, voilà que leur allié potentiel avait mit les voiles ailleurs. Chance fronça les sourcils en cherchant Vitharr du regard. Peut-être se cachait-il autre part dans la salle, mais il ne le vit nulle part. Voilà qui était unique, songea-t-il en se tournant à nouveau vers le voyageur. « Qu’en penses-tu Matylda ? » Il voulait avant tout avoir son avis sur la question, parce qu’il ne ferait rien sans son aval. Ils étaient plus qu’alliés. Ils étaient une Hanse et ce n’était plus ‘chacun pour soi’ désormais.

- astrithr -

-8h

Voilà des mois que Mab se tenait à l’écart de ses vieux démons. Depuis qu’il avait mis le pied sur terre d’exil, sur le continent, il s’était accordé le moins de temps possible auprès des autres Hommes. Loin de la politique, loin des affaires des puissants, des sordides affaires des pauvres, des dangereuses histoires des aisés. Tout ce qui lui avait coûté sa vie passée, il souhaitait la mettre derrière lui. Enterré pour de bon.

Ses intentions avaient commencé à flancher au fur et à mesure des rencontres qui croisèrent ses pérégrinations sur le continent. En commençant par la jeune Adrianna de Metinna qui par sa douceur fit arrêter de maugréer le druide taciturne. Sa vision incomplète rapprochait inexorablement le jeune soldat en face de lui à la jeune noble plus au Sud du continent. C’était désormais puissant depuis qu’il était face à l’homme qui avait nettement plus envie de l'ocir que de l’inviter à le suivre.

Une autre personne avait ramené Mab auprès des humains durant une courte nuit : La sorceleuse qui aujourd’hui manigancée avec le même jeune homme. Le druide de Skellige en savait trop de la vie pour y voir un hasard. Il n’avait encore aucun contrôle sur les visions qui le frappaient de façon impromptu… Mais il savait encore analyser les signes qu’on lui envoyé : Il devait rencontrer ce soldat ! C’était chose faite et la rencontre pouvait tourner courte quand on voyait sa nervosité et la main tentée d’enfoncer une dague dans les côtes du druide.

Mab ne fit pas le moindre bruit, scrutant le regard de l’interlocuteur qui avait sa vie entre les mains.  N’écoutant que distraitement les gardes à leur recherche, surtout vigilant à l’arrivée d’une nouvelle vision, un nouvel élément lui permettant d’y voir plus clair.

Une courte information apparu dans sa tête. Un simple mot. Un prénom.

Dès lors que le garde ne s’occupa plus de la troupe et retourna à ses affaires, Mab mis à nouveau une fois sa vie entre les mains du destin

“ Juan ? Je pense que nous étions appelés à nous rencontrer “

Il ne savait pas l’utilité de ses récentes visions, ni s’il aurait encore la chance d’en avoir d’autres … Mais Mab n’avait pas besoin d’elles pour comprendre la situation dans laquelle elles l’avaient mis. Le jeune bravache des îles de Skellige aurait craché une réponse au destin funeste au jeune soldat devant lui mais l’âge avait apporté une dose de sagesse de plus en plus teintée par de cet esprit provocateur qu’on retrouvait si souvent sur le Continent.

“ Dans quel camps je suis ? Certainement pas celui du garde qui a failli nous surprendre il y’a quelques minutes. Ce même garde que j’ai vu détrousser une femme en détresse profitant de sa position de pouvoir.
Mais probablement pas celui de ton maître non plus si j’en devine les méthodes. Avec un peu de chance, nous pourrions être du même bord si tes intentions ainsi que celle de la jeune sorceleuse sont dans la sauvegarde du plus grand nombre de vie dans le grand schéma de la petite politique… “

Aucune vision là non plus n’était nécessaire pour percevoir la tension éclaboussant cette ruelle sale. Mab savait qu’un des engrenages dans la tête du soldat envisageait l'enchaînement des actions pour éliminer l’encombrant druide et cacher le corps assez longtemps pour continuer son opération nocturne.
Sa lecture de l’âme humaine n’était pas toujours sa plus grande faculté mais il sentait néanmoins que leur destin pourrait se continuer bien au delà de cette nuit.

Tendant le bras vers l’obscurité qui avait englouti la sorceleuse

“ Dame Skadi a peut-être besoin d’aide ? “

« Nous battre ? Ah ! Pourquoi pas après tout. » Mais dans le fond, il savait, cela ne risquait sans doute pas d’arriver. Il fallait être réaliste après tout : le Nilfgaard serait bientôt à leurs portes et les sudistes avait un don tout particulier pour raser les cités. Les gens de Cintra avaient eu sans aucun doute le même discours que ce brave monsieur ; aujourd’hui ils reposaient six pieds sous terre. Chance jeta un bref coup d’œil à Matylda en espérant qu’elle puisse lire dans son esprit qu’à tout moment ils avaient la possibilité de fuir ou retourner leur veste. Dans un cas comme dans l’autre, l’objectif était de rester en vie coûte que coûte. S’échapper en portail avait été compris par la soudaine disparition de leur précédent compagnon, mais dans le chaos de la bataille personne ne ferait attention à eux.

Vers le milieu de la nuit, la fatigue avait commencé à frapper. Chance n’aurait pas craché sur un peu de sommeil, tant qu’à être coincé dans une situation telle que celle-là, mais en se calant sur dossier de sa chaise il avait fermé les yeux pendant une heure ou deux à somnoler l’air de rien. Lorsque l’aube avait pointé à travers les carreaux sales de la taverne, on sut que quelque chose de sombre ne tarderait pas à ternir le paysage. Le son des cloches ramena Chance à la réalité. D’un coup d’œil, il chercha Matylda pour voir si elle était encore dans les environs. Il se sentait coupable de les avoir retardé lorsqu’ils avaient la chance de s’échapper discrètement, mais ses remords furent de courte durée. Au loin, on pouvait entendre les cris des soldats qui se préparaient à l’assaut imminent.

« Tu penses qu’on peut sortir, voir où les choses en sont ? » Murmura-t-il à l’attention de son amie. Il ne disait pas non à un peu d’air frais.

- astrithr -

-24h